SNCF, Noveant, Auschwitz…

 

Auschwitz 12

Nous revoici chez Simone Schihin, qui vit aujourd'hui à Scy-Chazelles. Trop tard pour lui reparler durant des heures de sa jeunesse heureuse à Novéant-sur-Moselle. Elle qui aimait tant raconter... Si l'esprit pétille encore dans les yeux de cette dame de 90 ans, la mémoire hélas ne passe plus. Mais au hasard d’une photo, pointée du doigt sur l’album de famille, une lueur revient soudain, comme un wagon sorti brusquement du tunnel…

En 1940, elle s’appelait encore Simone Lhuillier. C’est avec le regard incrédule d’une jeune fille de 19 ans qu’elle vit les Allemands s’installer à Novéant comme s'ils étaient à nouveau chez eux. Mais elle ignorait alors qu'elle deviendrait, des années plus tard, un des derniers témoins de la cruauté nazie. Aujourd’hui, à part quelques octogénaires et de rares survivants des camps, qui mesure encore pleinement ce que signifia le choc de la défaite chez les Mosellans? Du jour au lendemain, tout comme le fut Simone, les Novéantais se retrouvaient citoyens de Neuburg in Lothringen, comme au temps de la première annexion. Leur bourg de cheminots affairés, jusqu’alors ouvert aux quatre vents comme le veut la tradition ferroviaire, se rétrécit brutalement aux dimensions d’un nœud de voies ferrées sinistres, à l’orée d’un portail menaçant vers le Reich.

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De 1941 à 1944, entre la route et la rivière, les habitants de Novéant durent faire comme s'ils ne voyaient pas les convois de déportés pétrifiés par l’angoisse. Alors qu'entre les lattes mal ajustées des wagons, ils distinguaient la pâleur de têtes hagardes, des têtes vers lesquelles une soldatesque agressive interdisait le moindre clin d’œil de compassion. On risquait de se trouver dans un prochain convoi si l’on était pris à répondre à ces regards perdus balayant le sable des quais. Semaine après semaine, les trains s’engouffraient ainsi dans le trou noir de l’après-Novéant, aussi brutalement que l'on disparait, aux fêtes foraines, dans le wagonnet d’un Train fantôme. Hélas, les trains fantômes de Neuburg partaient vraiment vers un Musée des horreurs. Ils étaient installés dans l’horreur, bien avant d’arriver à Auschwitz...

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