Clochemerle païen au XIXe

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Sait-on que, nichés au flanc de la cathédrale de Metz, les Républicains du "Café Français" empoisonnaient les dimanches de l’Evêque?

De nos jours à Metz, aux heures de pointe, on voit place de l’Hôtel de ville des piétons qui font le pied de grue sous l’abribus. Ils balaient d’un œil absent les fenêtres de la Mairie en attendant que le museau d’un TCRM surgisse de la rue des Jardins.

S'ils savaient que, dans leur dos, se niche un lieu historique, ils se tourneraient plutôt vers la cathédrale Saint-Etienne... Mais comment voulez-vous qu'ils en aient l'idée? Derrière la grille du monument, dans le renfoncement qui sépare de transept de la chapelle des évêques, ils ne voient en effet qu'un atelier vitré encombré de bois et de pierre où l'on distingue parfois, entre poussière et reflets, un sculpteur sur son bloc de Jaumont.

Pour décrypter ce lieu, il faudrait déjà être au courant. C'est comme au cimetière: les ondes d’un être cher ne pourront jamais traverser le marbre de sa tombe si l'on a oublié qu’il dort dessous. De même, la tête la plus fûtée ne pourra jamais capter les vibrations d’un lieu de mémoire si elle ignore que ce lieu existe. Voilà pourquoi la majorité des Messins préfère aujourd’hui recompter les pavés devant la Mairie.

Pas la moindre plaque!

L’endroit sent le soufre, mais si vous cherchez la moindre information, allez au diable! La cathédrale, visiblement n'a aucune envie de raconter ce moment savoureux d'histoire messine. Et moi, j'ai une larme en pensant à ces milliers de touristes pompidoliens qui dorénavant tournent en boucle au centre ville après qu'une matinée d'art conceptuel ait aiguisé leur appétit. N'est-il pas dommage de les voir s'agglutiner à la sortie du Portail de la Vierge en cherchant de vue un restaurant? Ils ne sauront jamais qu’un psychodrame clochemerlien s’est joué ici, pendant deux siècles, au flanc du majestueux vaisseau gothique.

Vous vous demandez comment expliquer un tel oubli? La Cathédrale de Metz est une vieille damequi en a vu d’autres et chacun sait qu’au Moyen-Age, n‘importe qui pouvait se blottir contre la maison de Dieu. Le diocèse de Metz aurait pu, depuis longtemps, donner au syndicat d'initiatives la permission de visser une plaque ad hoc sur la grille.

Mais il n'y a pas d'oubli. Seulement un grand coup d'éteignoir. Lorsque vous saurez la suite de l’histoire, vous conviendrez qu’il était difficile à tout évêque messin de trousser, pour la défense du Patrimoine, quelques lignes bien calibrées, même écrites en latin de cuisine, pour le seul plaisir de mettre les rieurs de son côté. L’humour post-concilaire a des limites.

C'est en effet deux mots bannis qu'il eût fallu graver pour nous dire qu’à cet endroit, se trouvait le fameux "Café Français".

Regardez la photo qui suit et voyez comme il a l'air innocent. On dirait un manoir avec sa façade habilement ornée demi-douzaine d’arcades.Elles faisaient partie de la fameuse galerie dessinée par Blondel au flanc de la Cathédrale, bien avant la Révolution.

Arrière Satan! Ce lieu cossu, à qui l'on donnerait d'entrée une étoile au Guide Michelin en même temps que le Bon Dieu sans confession, fut durant près de deux siècles la cuisine des humeurs laïques, le chaudron diabolique au fond duquel plusieurs générations de bourgeois messins mitonnèrent avec gourmandise un potage anti-clérical.

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Pour mesurer l’ampleur de l’affaire, il faut revenir sur l'époque. Au début du XVIIIe siècle, les gens de Metz s'étaient retrouvés majoritairement royalistes et catholiques mais Napoléon avait laissé des traces. L'opinion moyenne était alors moins soumise qu’un Français de l’intérieur le pense et dès 1848, le souffle républicain avait fini par modifier la sensibilité locale. Il ne faut pas s'en étonner. Le citoyen messin de bonne souche s'est toujours maintenu dans une tolérance orgueilleuse. Il garde au coeur un sentirnent de capitale spoliée qui doit lui couler dans le sang depuis la "République Messine". L’Histoire n’a cessé de l’humilier, mais il n’en pense pas moins. D'où son amour chatouilleux, dès qu'il s'agit d'architecture..

Ainsi, à propos de l’image de leur cathédrale, les autorités d’avant la Révolution, qu’elles fussent civiles, écclésiastiques ou militaires, n’étaient pas souvent d’accord. Dès 1761, sous Mgr de Montmorency-Laval, certains avaient déjà protesté contre le monstrueux portail de Blondel, qui enfermait leur maison du Bon Dieu dans un lourd bahut gréco-romain. D’autres n’appréciaient pas la rangée d’arcades passantes que le même Blondel avait fait courir le long du versant sud, précisément du côté où se trouvait le "Café Français". Alors que d’autres voulaient conserver, au contraire, le classicisme orgueilleux que les grands commis du Roi avaient dessiné.

De toute façon, la population messine appréciait beaucoup, sous la galerie, la douzaine de commerces et d’habitations qui l’occupaient tout du long, faisant du quartier le centre le plus papoteur de la ville, un petit Palais Royal à la parisienne.

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Liturgies sans-culotte au pied du vaisseau

Aux premières années de la Révolution, alors que la Cathédrale se sentait quelque peu comprimée par la rangée d’arcades, la Convention ne s’intéressait guère à ces jalousies d'architecture. On laissa les voûtes en l’état, tout en se réjouissant de les voir accueillir chaque soir une foule de discuteurs. Les piliers qui bordaient la place devinrent peu à peu la chambre d’écho du Siècle des Lumières et plus tard le champ clos des nouvelles liturgies sans-culotte.

Le brave Suisse de la Cathédrale a raconté sa nuit du 7 au 8 juin 1794, alors que pour le raconter plus tard, il avait dû se lever de bonne heure et se cacher entre deux gargouilles, en l’honneur de "l’Etre suprême". Il a écritce qu’il avait vu:

"La fanfare avait attaqué à 3 heures du matin son "Allons jouer sous les ormeaux", la chanson de Jean-Jacques Rousseau que tout le monde connaissait par cœur. Les nouvelles autorités locales étaient arrivées vers 6 heures, suivies par cent adolescents tenant fusil en main, vingt pères de famille portant l’épée à la ceinture et vingt femmes de la ville agitant des guirlandes de roses… On proclama que le peuple messin reconnaissait l’immortalité de l’âme, et l’on vit arriver pour finir dix enfants couronnés de violettes, dix jeunes gens couverts de myrtilles, dix adultes harnachés de branchages de chêne et dix vieillards porteurs de pampre et d’olivier…"

L’esprit de la ville avait certes beaucoup changé mais le premier Empire n'avait pas trop toucha à l’architecture générale du quartier, se contentantde donner à la place le nom de Napoléon. De leur côté, les évêques de Metz n’avaient guère le temps de s’occuper de Blondel car la Révolution, et ce qui s'en était suivi, les avait fortement secoués.

Un vrai jeu de quilles...Entre 1789 et 1824, ils n‘avaient cessé de valser à chaque changement de régime. Mgr de Montmorency avait été débarqué par la Convention comme réfractaire et remplacé par Mgr Nicolas Francin, évêque constitutionnel… Ce dernier laissa la place à Mgr Pierre-François Biennaymé qui fut remplacé par Mgr Gaspard-André-Jauffret, le temps d’accueillir Mgr Claude-Ignace-Laurent. L’Empereur s’en amusait beaucoup et appelait ironiquement les évêques ses "préfets violets". Il fallut Waterloo et le retour de la royauté pour qu’à l’arrivée de Mgr Jacques-François Besson en 1824, l’épiscopat messin retrouve sa vieille stabilité. Et l’on put enfin ressortirle vieux projet de destruction des arcades.

Du séisme politique de 1789, on pensait avoir oublié l’essentiel mais la révolution de 1848 allait à nouveau secouer l’Europe, aussi naturellement qu’un tremblement de terre a des répliques. En Moselle une majorité de royalistes revigorés rêvaient certes de marier leur fille au gratin des "Artilleurs de Metz", sans savoir qu’une chanson célèbre transformerait plus tard ce vivier de polytechniciens bon-chic-bon-genre en braillards de maison close. Mais à l’autre bord, on trouvait un noyau messin de bourgeois républicains, venus du commerce, de l’industrie, des professions libérales, et parfois de l’armée. Tous fortement influencés par la franc-maçonnerie britannique et "bouffeurs de curés" comme on respire.

Ces bourgeois avaient déjà pris, depuis longtemps, possession des Arcades, qui avaient le statut municipal d'une rue. Ils fréquentaient quatre débits de boissons bardés d’enseignes de bonne allure: L'histoire ne dit pas si les trois premiers, à savoir le café Bastien et le café Fabert dans la maison Caron-Dolisy (aux 10, 9 et 8 ) et le café de la Meuse dans la maison Verronnais (au 3) avaient des clientèles ouvertement Républicaines. Mais l'on sait que dans le quatrième, c'est-à-dire le Café Français dans la maison Bride (au 7), le patron avait juste le temps de déployer ses jeux de jaquet. Car les anti-cléricaux hilares buvaient un coup à la santé de l’Evêque, chaque fois qu’ils lançaient les dés.

L’Eglise supportait mal ces repaires de mécréants incrustés comme des moules au flanc de son vaisseau mais le nouveau pouvoir royal se gardait bien de choisir entre la pression des chanoines et la résistance des cafetiers. La Préfecture savait que les arguments d’ordre esthétique avancés par l’Evêché n’étaient faits que pour la galerie…Ce que le chapitre voulait à cette occasion, c'est le départ de tous les provocateurs. On ne l'écouta pas. Les premières opérations de rachat ne furent vraiment lancées que dans les années 1820 et durèrent jusqu’à Louis-Philippe…Il fallut encore trente années de palabres pour qu’autour des années 1860, toutes les maisons, y compris les cafés, soient enfin démolies. Toutes sauf une: "Le café Français"!

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L’ennui, c’est qu’à l’époque, l'évêque de Metz n’était pas le premier venu. Sacré depuis 1843, Mgr Paul Georges Marie Dupont des Loges n’avait certes pas fait grosse impression à son arrivée mais il avait du sang breton dans les veines. On s'était vite aperçu qu'il était le produit culturel d’une aristocratie austère et belliqueuse, très allergique aux humeurs républicaines. Sous un camail mollasson et de faibles épaules, se cachait un caractère de lion.

Il faut se mettre à sa place en 1860. Pendant une quinzaine d’années, tout comme son prédécesseur Mgr Besson, il avait supporté les turbulences des quatre brasseries aux lisières de sa cathédrale. Et l'on peut parier qu’il avait poussé un gros soupir à la disparition des trois premières. Mais le sentiment de satisfaction intellectuelle qu’il en éprouva, loin de faire naître en lui le désir chrétien de pardonner à la quatrième, se transforma en sainte fureur. Le Diable lui faisait le pied de nez, caché dans la verdure.

L’évêque avait certainement son idée sur l’origine du coup de piston dont l’ennemi avait profité dans les couloirs municipaux. Mais voir ainsi le "Café Français" récupérer la clientèle orpheline de ses concurrents pour devenir, dans le ventre mou de la Cathédrale, la tête de pont officielle des bouffeurs de curé, c était beaucoup. Le prélat ombrageux avait beau garder la tête froide, il conservait cette épine dans le pied.

Mgr Dupont des Loges est furieux

De nombreux messins s’opposaient encore à la destruction des voûtes de Blondel et cette évidence contrariait beaucoup l'évêque. Mais il devait s'y faire: le pouvoir avait la tête ailleurs. Napoléon III venait d’inventer l’empire libéral et le pays ne pensait plus qu’aux affaires. Même au "Café Français", les bourgeois de gauche dépliaient des journaux où il n’était question que de chemin de fer, de colonies à conquérir ou d’usines à bâtir. La cathédrale pouvait encore attendre.

Entretemps, Dupont des Loges avait beaucoup appris, notamment la manière d’affiner sa posture politique, en taisant peu à peu ses options royalistes pour ne point ajouter aux passions locales. Mieux lui valait opérer avec prudence, une qualité que l’on reconnaît toujours au clergé, mais qui, en ce qui le concerne, le plaçait nettement au dessus de la moyenne. Cette finesse matinée de fermeté avait fait de lui un diplomate inclassable, attentif au respect des manières locales, tout en usant habilement de soudaines colères dont la ville avait aussitôt l’écho. Pour cet homme habitué à régler par le haut des problèmes complexes, il était vexant de devoir plier, par le bas, devant ce qu’il considérait comme des mécréants de comptoir.

Tout le monde savait que dans son collège, il avait collectionné les premiers prix en français, en grec ou en latin. On racontait qu’il avait épaté les correcteurs du bac en racontant la vie d’un curé de campagne. Bref, la fermeté qu’il avait maintenue derrière la souplesse de ses attitudes avait fini par lui gagner l’estime et la confiance de ses diocésains. Le Tout-Metz avait compris que cette histoire de café empêchait le saint homme de dormir.

Nul ne pouvait prévoir, bien sûr, le destin exceptionnel qui attendrait bien plus tard ce berger tout d’une pièce. L'Histoire, avec un grand H, l'attendait en 1870, à l’arrivée des Allemands… Comment aurait-on pu imaginer que cet ombrageux latiniste accepterait, sous la pression des Messins, d’aller s’asseoir en 1874 au Reichstag de Berlin dans un fauteuil de député mosellan, juste le temps, il est vrai, de faire un orgueilleux demi-tour. Mais dans les années 1860, le seul conflit qui tourmentait encore Mgr Dupont des Loges, c’était son "Café Français!"

Le psychodrame clochemerlien qui se jouait autour de la Cathédrale finit par amuser tout le monde, sauf les sectaires des deux bords. Le dimanche matin, les habitués du "Café Français" attendaient le début de la grand-messe pour chanter autour des tables de merbre. Leurs moqueries traversaient les murs pendant les offices. Au délà de cet enfantillage, il y avait comme un goût retrouvé pour l’anticonformisme ancien de la cité.

Mgr Dupont des Loges l’avait-il compris? Il savait la Moselle au cœur d’une région sensible que les blessures de l’histoire avaient malmenée au point de doter l’opinion locale d’une élasticité à toute épreuve. "J‘ai moins à arracher l’ivraie du champ qui m’est confié, disait-il, qu’à empêcher l’homme ennemi d’y jeter des semences mauvaises."

Il avait donc continué de batailler sur tous les fronts, notamment avec le Préfet, invitant ses curés à montrer envers ce dernier "de la politesse froide, cette tristesse même, qui convient vis-à-vis d’un homme ennemi du clergé". Un autre jour, le prélat refusa ostensiblement d’accueillir la dépouille d’un commandant de la garde qui s’était suicidé. Et comme on le prenait de haut dans les casernes, il ferma la porte de la cathédrale au nez du cortège, et mit ostensiblement la clé dans la poche de sa soutane. Ce qui, même pour un évêque, passa pour culotté. Il s’étonna plus tard "qu’on ait osé parler de Darwin" lors d’une conférence à l’Hôtel-de-ville, ce qui poussa les persifleurs du "Café Français" à rappeler que même un évêque descend du singe.

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Fin des hostilités

Ce fut donc 1870 et le choc monstrueux de la première annexion. Fin de la guerre et fin de la guéguerre. Tout a changé. Du jour au lendemain, notre fier Breton se retrouve germanisé alors qu'il était arrivé à Metz sans jamais avoir parlé un mot d’allemand! Comme il n’est pas question pour lui d’abandonner son diocèse en face du vainqueur, il essaie de reprendre en finesse les postures qui lui avaient si bien réussi avec ses ouailles. Quelques jours après l’invasion, il snobe les autorités prussiennes en refusant que sa cathédrale puisse servir de lieu de culte aux nombreux soldats protestants. Il leur refait le coup de la clé dans la poche et ça remarche! Il devient célèbre à Paris où l’on honore son panache dans les journaux. On raconte que ne pouvant supporter la présence d’une sentinelle allemande devant l’évêché, il avait invité le malheureux, devenu écarlate, à monter près de lui dans sa voiture et l’avait ramené jusqu’au Gouverneur, comme on le fait d’un chien perdu au bout de sa laisse.

Une autre vie commence… Au "Café Français" toujours pas fermé, beaucoup de républicains sont partis en exil et l’anticléricalisme se dilue dans la résistance à l’occupant. Les clients savent que Mgr Dupont des Loges se débat quotidiennement avec les Prussiens et sa nouvelle stature en impose même à ses vieux ennemis. Quand un mouvement d’opinion le désigne pour le Reichstag, les Messins sont persuadés qu’il va profiter, en passant, de sa fonction pour obtenir des Allemands la fermeture en douceur du "Café Français". Le dernier qui reste. Et personne ne peut douter que s’il l’avait pu, il l’aurait fait.

Hélas, Mgr Dupont des Loges n’a vraiment pas de chance! L’Allemagne, à son tour, fait dans l’anticléricalisme… Elle est soumise depuis plusieurs années au "Kulturkampf". Le chancelier Bismarck va mener dans son pays une politique anti-confessionnelle dont les mandements lancés depuis Berlin arrivent forcément jusqu’à Metz. Et du coup, le Café tient bon, bien que sa fréquentation soit devenue culturellement assez compliquée. Elle exige dorénavant que l’on soit viscéralement Français dans la douleur, totalement laïque dans l’esprit et vaguement bismarkien dans les idées. Facile à dire.

On ne peut qu’imaginer la confusion qui régnait alors, sous les arcades en partie démolies. Un noyau d’artistes allemands de sensibilité républicaine s’installait à Metz, où se trouvaient certes plusieurs cafés attachants, mais ouvertement très francophiles et patriotes. Ne s’y sentant pas très à l’aise, certains de ces Prussiens déracinés ont peut-être recherché, dans l’ombre ambigue du "Café Français", l’ébauche d’une première conversation européenne avec des Messins radicaux dépassés par l’annexion. On ne le saura jamais.

Un Ouf épiscopal

Quand Birsmark fait marche arrière et renonce à son "Kulturkampf", Mgr Dupont des Loges obtient enfin des Allemands la peau de son cher ennemi. Nous sommes en 1882. Le "Ouf!" que poussa mentalement l’évêque a dû s'évaporer définitivement sous la voûte. On dit que les grandes colères se dégonflent toujours, mais c'est faux. Il est dommage que l’on n’ait pu récupérer le souffle vengeur de Mgr Dupont des Loges, car il aurait mérité de figurer au catalogue des Trésors de la Cathédrale, après avoir été pieusement recueilli dans une ampoule.

Le dernier bâtiment des arcades fut donc détruit en 1882, et le "Café Français" partit avec. Sous la pioche de Tornov et de son ami Dujardin, les Allemands commencèrent enfin la démolition du portail de Blondel et la libération complète des abords du bâtiment. La galerie disparut. A la place, on remodela ce qui restait du portail de la Vierge (l’entrée actuelle). Le Café ne devint plus qu’un futur arrêt d’autobus. Et Mgr Dupont des Loges mourût en paix, en 1886.

Je viens de relire attentivement l’incontournable travail de Pierre-Édouard Wagner et Jean-Louis Jolin, dans l’espoir d’y dénicher, entre deux paragraphes, quelques indices révélateurs… Mais si nos deux historiens de la Cathédrale n’ont rien trouvé, c’est que les vieux tiroirs sont vides. Rien non plus dans l’ouvrage de feu l’abbé Félix Klein. Il nous reste à rêver qu’un sculpteur au ciseau chanceux exhume demain, glissé dans la crevasse d’un pilier, quelque carnet d’humeurs notées au jour le jour, par les cafetiers successifs, durant deux siècles… Rien que pour rappeler aux Français de l’Intérieur que Metz, croyante ou pas, n’a jamais été une capitale soumise.

JG. (novembre 2010)